Projet Innovation du Geotop
2018-2020
Les étangs vernaux sont des milieux humides temporaires isolés du réseau hydrographique. On les retrouve typiquement au sein des forêts tempérées de l’Amérique du Nord, où ils occupent souvent des cavités dans le roc. En raison de la courte durée de leur hydropériode, ils constituent d’importants habitats permettant la reproduction et la maintien d’espèces vulnérables (ex. amphibiens, insectes et invertébrés aquatiques). Ces étangs contribuent donc significativement à l’enrichissement de la biodiversité à l’échelle des paysages forestiers. En dépit de leur grande importance écologique et de la nécessité de les préserver sur le territoire, la sensibilité de ces environnements aux différentes pressions environnementales et anthropiques (changements climatiques, transformation du territoire forestier, drainage, etc.) demeure méconnue. Ce manque de connaissances nuit à la mise en place de mesures de protection appropriées visant à maintenir les fonctions de ces écosystèmes sur le territoire. Les premiers bilans hydriques effectués (Kenauk Nature, en Outaouais) montrent cependant clairement que l’hydropériode est influencée par l’abondance des précipitations, l’évapotranspiration et tout particulièrement les niveaux de nappe. L’hydropériode des étangs vernaux pourrait donc être altérée par des modifications de l’hydrologie régionale affectant de manière persistante l’une où l’autre de ces variables dans un contexte de changement climatique. Le principal obstacle à une meilleure évaluation de la sensibilité des étangs vernaux aux pressions environnementales demeure la rareté des mesures directes dans ces écosystèmes où les suivis hydrologiques sont au mieux extrêmement ponctuels et de très courte durée (quelques années tout au plus). Dans ce contexte, l’approche paléohydrologique offre une excellente opportunité pour documenter la variabilité du fonctionnement hydrologique et la vulnérabilité de ces environnements face aux pressions environnementales. Les sédiments organiques retrouvés au fond des étangs et les populations forestières situées dans l’environnement immédiat sont de véritables témoins du passé. Ils peuvent permettre, à l’aide de méthodes spécifiques, de reconstituer l’histoire de la variabilité écohydrologique des étangs vernaux à l’échelle des derniers siècles, une période caractérisée par d’importantes fluctuations hydro-climatiques et une transformation significative du paysage forestier environnant (successions de coupes forestières).
La présente étude vise l’acquisition et l’analyse de différents paléo-indicateurs permettant de reconstituer les changements écohydrologiques ayant faconné le développement et la dynamique des étangs vernaux. Cela permettra de reconstituer le contexte de mise en place de ces environnements, de comprendre un peu mieux l’hydrologie de la région au cours des derniers siècles et d’identifier la variabilité (i.e. sur quelques décennies) des hydropériode des étangs vernaux. Le territoire visé pour ce projet est une réserve privée couvrant 260 km2 en Outaouais et appartenant à Kenauk Nature et à Conservation de la nature Canada. Ce site de villégiature et de conservation est un endroit de choix pour étudier la résilience des étangs vernaux puisque l’écosystème a été très peu perturbé depuis la colonisation. La dynamique hydrologique de 16 étangs vernaux et les conditions météorologiques actuelles, passées (dernier siècle) et futures (jusqu’en 2100) y sont étudiées par l’équipe de Marie Larocque depuis 2016.